Aden (février 1998)

Marie Legros, et en détails

Jade Lindgaard

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Marie Legros : « La vidéo ? Un malentendu qui a bien tourné. »
Installations, vidéos, performances : Marie Legros ne construit pas, elle raconte. État des lieux chez l'artiste.

Dans la cuisine de Marie Legros, les objets ont une âme. Une guirlande de bonhommes en papier évoque le travail de Boltanski, trois boules de pâte à modeler rappellent les boutons d'un ascenseur et une photo de Nan Goldin traîne sur le toaster. Intérieur gentiment désordonné que traverse le chat de la maison, après s'être suspendu au boa de sa maîtresse. Et c'est de la même démarche, en plus hésitant, que la jeune artiste marche sur ses meubles dans la vidéo Marcher sur les objets ? ? ? les choses. Une saynette rapide et drôle dans laquelle Marie ne filme que ses pieds, passant d'une chaise à un bureau sans jamais toucher le sol.
Marie Legros, 35 ans, travaille la vidéo depuis peu. Un « malentendu qui a bien tourné », explique cette ancienne sculpteuse, qui aime aussi le dessin pour son rapport au corps. « Je ne crois plus du tout à une production d’objets, au côté artiste-démiurge face une oeuvre qui prend forme. En fait, j'ai un infini respect pour la vie qui est là. À la limite, si je recommençais à sculpter ce serait pour mouler ce qui est déjà là. » Pour la soirée Prospect du centre national de la Photographie, elle prépare un ballet de sacs plastiques dans le jardin du bâtiment, qu'elle prévoit de filmer avec Georges Tony Stoll, au gré des coups de vent et dépressions atmosphériques. Des moniteurs disposés dans les salles du CNP diffuseront ses vidéos. Comme dans un appartement. « La notion de temps présent est très importante en vidéo, à la différence du cinéma », continue l'artiste, qui s'est filmée décollant ses cheveux scotchés à un mur (en 1992, pour l'exposition X/Y le sexe de l'art) ou tout récemment, piétinant un tapis d'égout (à Glassbox). Le cheveu court et le verbe haut, Marie Legros a créé une association avec d'autres artistes pour défendre des créateurs inconnus. Ce collectif destiné à monter des expositions en des lieux itinérants s'est donné un nom de guerre : Attack. Ou Atac, « comme le magasin ».

J.L

© Marie Legros M — 2023 — crédits